Hausses d'impôts ou pas? Officiellement, les impôts baissent, y compris pour les entreprises. Pourtant, 2017 va révéler deux mauvaises surprises pour les entrepreneurs, et l'addition risque d'être salée. Une troisième nouvelle a finalement été abandonnée par le gouvernement devant le tollé des organisations patronales.
Le calcul de l'ISF tient désormais compte des holdings patrimoniales
La loi de finances 2017 prend une mesure crainte depuis plusieurs années sur le plafonnement de l'ISF: les revenus tirés des "cash box", c'est-à-dire des holdings patrimoniales, seront intégrés dans l'assiette de revenus pour le calcul de l'ISF. Cette mesure en apparence technique permettra donc de majorer le montant de cet impôt.
C'est évidemment un mauvais coup pour tous ceux qui utilisent les revenus mobiliers d'une cash box pour minorer le montant de leur impôt sur la fortune. Une fois de plus, les entrepreneurs qui ont décidé de rester en France en bénéficiant d'un aménagement de la fiscalité pour ne pas consacrer plus de 75% de leurs revenus à l'impôt en seront pour leurs frais. Indécrottablement, Bercy frappe au fil des besoins budgétaires le portefeuille de tous ceux qui ont eu la mauvaise idée de s'enrichir en prenant des risques.
Le résultat de cette mesure est bien connu d'avance: les entrepreneurs ont tout intérêt à s'installer en Belgique, où le patrimoine n'est pas taxé, et où le Paris-Bruxelles dispose du wi-fi embarqué pour un trajet d'1h20, quand aucun TGV intérieur ne le propose, même sur des trajets qui durent 3h.
Le Conseil Constitutionnel en rajoute une louche
Par une décision rendue dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil Constitutionnel modifie négativement la fiscalité sur les montants distribués en faveur des sociétés d'un groupe fiscalement intégré. La société Layher, qui n'est pas fiscalement intégrée, a souligné que l'exonération de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés au titre des montants distribués était inconstitutionnelle dans la mesure où elle était réservée aux seuls groupes fiscalement intégrés.
Le Conseil Constitutionnel a suivi ce raisonnement et a considéré que l'intégration fiscale ne justifiait pas une différence de traitement réservant aux uns l'exonération de cette contribution de 3%, et pas aux autres. Concrètement, les montants distribués par une filiale à la société mère dans le cadre de l'intégration fiscale devraient donc faire l'objet d'une taxation de 3% à compter du 1er janvier 2017.
Le Conseil Constitutionnel a donc laissé le soin au législateur d'aménager ce dispositif par la loi de finances pour 2017.
La fiscalité se durcit et continue son instabilité
Ces deux mesures sont sans lien direct, autre que la volonté manifestée par l'Etat de déjouer toutes les stratégies d'optimisation qui permettent aux entrepreneurs et aux entreprises d'adoucir une fiscalité fondée sur des taux confiscatoires. Personne ne se satisfait vraiment de cette multitude de niches et d'astuces complexes pour obtenir des baisses d'impôts. Mieux vaudrait une baisse globale des taux pour que la situation soit lisible et claire.
Faute d'une appétence des pouvoirs publics pour cette clarté, les acteurs de la vie économique sont conduits à pratiquer un système D destiné à garantir leur survie fiscale. Progressivement, une chasse au système D se met en place. Les conséquences sont évidentes: ceux qui ne veulent pas consacrer 75% de leurs revenus à l'impôt, les entreprises qui se structurent pour ne pas voir leurs maigres bénéfices captés par une administration ruineuse et peu performante, partiront à l'étranger.
L'instabilité et l'inquisition fiscales sont les deux mamelles de la misère.
Bercy voulait durcir les seuils sociaux
Au détour d'une information lancée par l'AFP, la direction de la sécurité sociale a envisagé de publier un décret intégrant les apprentis dans le calcul des effectifs des entreprises. Cette décision aurait mécaniquement baissé les seuils sociaux sans modifier l'état du droit. En particulier, les entreprises de neuf salariés employant un apprenti auraient vu leur contribution à la formation professionnelle majorée de 0,45% de masse salariale sans aucune modification de leur activité. Diverses autres contributions auraient fait l'objet d'une majoration.
Le gouvernement a finalement renoncé à cette mesure. Les organisations d'employeurs avaient commencé à monter au créneau. Elles ont remporté le morceau.
L'opération ne manque toutefois pas de laisser perplexe. Il y a encore un an, le ministre Rebsamen annonçait son intention de relever les seuils sociaux pour encourager l'emploi. Un an plus tard, non seulement ce relèvement n'est pas arrivé, mais c'est l'administration qui, au détour d'un décret, propose la mesure exactement inverse...
On connaît ici le mépris profond de la technostructure pour les très petites entreprises. Seules les grandes entreprises capables d'organiser le pantouflage des hauts fonctionnaires trouvent grâce à leurs yeux. Mais cet égoïsme et cette vision anti-économique peuvent-ils éternellement rester à l'abri d'une reprise en main?